INTRODUCTION
« L’expression d’un désespoir d’exister restait assez marginale, quand elle n’était pas de plus objet de dérision, comme chez certains surréalistes. »
« Nous nous intéresserons avant tout aux auteurs français, connus ou non, mais nous emprunterons aussi à quelques écrivains étrangers, connus en général, qui ont été liés aux mêmes courants de pensée que les premiers, et dont la réflexion sur le suicide et l’existence a marqué les lettres, au-delà des limites de leur propre pays. »
« Entre le suicide réalisé, le plus énigmatique, et l’aspiration passive à mourir, la tentation du suicide occupe tout l’espace où un individu désire mettre fin à ses jours, ou aspire à le faire. »
« Intimiste: celui qui cherche à découvrir, à connaître et à exprimer par écrit sa propre intimité,
son individualité ou sa vie; en général celui qui écrit des textes autobiographiques.
Autobiographe: celui qui écrit une autobiographie (c’est-à-dire, en s’inspirant de la définition de Ph. Lejeune, un récit rétrospectif de sa propre existence où il met l’accent sur sa vie individuelle); l’autobiographe s’oppose au diariste, tout en étant comme lui un intimiste.
Diariste: celui qui tient un journal intime. »
« Notre but est de proposer une géographie de la pensée suicidaire, à cette époque-là, dans le cadre autobiographique; c’est de déterminer l’ensemble des concepts, et de dessiner l’ensemble des images grâce auxquelles il était possible d’envisager cette possibilité, de réfléchir sur elle, ou de l’imaginer. »
1. ÉCRITS AUTOBIOGRAPHIQUES
« Le roman peut être lu en fonction de la personnalité de son auteur, il n’est pas une transcription de son existence. Eveline Mahyère se suicide comme l’héroïne du roman qu’elle vient d’achever, et le caractère de la seconde — dit-on dans la préface — laisse voir ce qui a conduit la première à se donner la mort. Mais le parallèle s’arrête là »
« Albert Camus débute L’étranger par: Aujourd’hui, maman est morte. Jean-Paul Sartre introduit La nausée par: Avertissement des éditeurs. Ces cahiers ont été trouvés parmi les papiers d’Antoine Roquentin. »
« La frontière entre l’écrit autobiographique et l’essai est sans doute la plus incertaine: le second, genre protéiforme, a parfois eu tendance à englober le premier et, sous sa forme moderne, il comporte souvent des passages de confession intime ou des récits d’expériences vécues. » Un moderne très ancien!
2. JOURNAL INTIME ET AUTOBIOGRAPHIE (incompleto)
« Là où le journal présente une personnalité prise dans ses conflits intérieurs, l’autobiographie va avoir tendance à dessiner l’image d’un caractère qui a dépassé ses inquiétudes et qui les assume en les intégrant à son passé. Le désespoir et la tentation du suicide sont, dans le journal intime, la transcription d’un présent; ils apparaissent, dans l’autobiographie, toujours au passé: ils sont rapportés comme les éléments les plus significatifs d’un état d’esprit, à un moment donné de l’existence de l’auteur, ou ils sont désavoués, incompris, oubliés, voire passés pudiquement sous silence. »
« L’autobiographie est l’élaboration d’une image de soi assurée et heureuse sur un passé qui, un temps, a vu cette assurance et ce bonheur menacés. » And here I am…
« Dans les autobiographies où le désespoir et la tentation du suicide ne sont pas minimisés ou occultés, ils sont intégrés au continuum de la vie. Souvent même, ils ne constituent qu’un élément parmi d’autres de la vie de l’auteur: moment fugace de celle-ci ou caractéristique secondaire d’une personnalité qui possède d’autres faces plus importantes. Simone de Beauvoir, Francis Carco et Corinne Luchaire, entre autres, et chacun à leur manière, s’arrêtent quelques pages sur la tentation ou la tentative du suicide qui a été la leur. »
Nenhuma autobiografia de um suicida que tenha narrado a exata cena de sua ‘apoteose derradeira’? Um futuro previsível.
« D’autres autobiographes, au contraire, en font le point de départ ou un point culminant de leur récit. Jean-Charles Pichon relate la lente dérive morale qui le mène à une tentative de suicide »
As Crônicas de um Suicida Contumaz.
« Entre les uns et les autres, ceux qui donnent une fin heureuse à leur récit sont ceux qui sont engagés dans le présent de l’écriture par leur victoire sur Thanatos. L’image finale qu’ils donnent d’eux-mêmes est celle d’individus qui ont appris à se détourner de la solution que leur offrait le suicide pour regarder à nouveau vers l’avenir. Et ils arrêtent leur portrait sur cette image. Les derniers mots de ces autobiographies portent un présent ouvert sur le futur, présent que la clôture du texte suspend au-dessus du silence, fige et éternise. »
« Après 1970, les autobiographies utilisant les temps du discours deviennent très courantes. Si l’on s’en tient à celles où l’auteur fait état d’une tentation de suicide, on trouve, entre autres, L’antivoyage (1974) de Muriel Cerf, Le pavillon des enfants fous (1978) de Valérie Valère, ou encore L’année de l’éveil (1989) de Charles Juliet, qui est un récit presque entièrement écrit au présent. »
« On ne peut pas affirmer que le passé simple, signe du récit historique, soit totalement absent du journal. Pour s’en tenir au même auteur, on trouve par exemple chez Charles Juliet: Même désarroi qu’à l’époque de l’adolescence, lorsque je découvris que tous les gens mentaient, ne recherchaient que le plaisir et l’argent, que la vie était une foire d’empoigne […]. Maintenant, je dois pénétrer dans l’arène. (…) Ce type d’emploi demeure très rare. »
« Sommeil disparu. Enclave du désespoir. Se lever. Se coucher. Se lever. Se recoucher, lance Francis Giauque. Le présent occupe tout l’espace mental du diariste, et s’impose à la lecture comme hors du temps, ou occupant tout le temps. La temporalité s’efface au profit de l’obsession présente, qui fait oublier qu’il y a eu un passé, qu’il y aura un futur. »
Segunda-feira, 21 de dezembro de 2020
23h41
« Le désespoir, la tentation du suicide apparaissent ainsi, sur le moment, comme indépassables:
Lundi, minuit moins vingt. Imbéciles, imbéciles qui m’entourez sans me voir. Ne comprenez-vous pas que je vais me tuer! »
« O desespero, a tentação do suicídio, surgem, assim, em cima mesmo do momento, como insuperáveis:
Segunda, onze e quarenta da noite. Imbecis, imbecis que me circundam sem me ver. Não compreendem que vou me matar! » ! ! !
crie Gabriel Matzneff.
Mas agora o que menos importa é o nome do autor!
« Le diariste conserve toutefois toujours la possibilité de ne pas écrire ce qu’il ressent, ce qu’il vit. Daniel Fleg indique par exemple, après un long silence: Je fus bien avisé d’interrompre ce journal. J’avais senti de loin revenir la dépression. »
« Ce silence est l’équivalent des réticences de certains autobiographes dont il a été question plus haut; le souvenir semblait trop douloureux pour être ravivé, à plus forte raison l’angoisse est-elle parfois difficile à transcrire. Ici l’auteur, voulant ouvrir une nouvelle période de sa vie, signale le motif de ce silence. Ce n’est pas toujours le cas et le lecteur est parfois réduit à des suppositions. Gabriel Matzneff n’écrit pas une ligne entre le 18 novembre 1960 et le 25 janvier 1961. Il avoue, à cette date, avoir passé deux mois au service de neuropsychiatrie du Val-de-Grâce, mais n’en précise pas la raison. Si l’on revient un peu en arrière, on peut se demander si l’auteur n’a pas attenté à ses jours… »
« On comparera, à ce propos, les Journaux de Stefan Zweig à son autobiographie, Le monde d’hier. Alors que les premiers laissent voir des désespoirs ponctuels, et montrent que l’auteur envisageait à certains moments le suicide comme solution (28 mai 1940, p. 293; 12 et 13 juin 1940, p. 298), cette possibilité est absente de la seconde. Dans ce dernier texte, le romancier raconte sa vie en la replaçant dans l’évolution politique de l’époque, mais en laissant de côté tout ce qui pourrait relever de la confession intime. Il se tient ici à un projet et opère des choix, alors que ses Journaux servaient de réceptacle à tous ses sentiments. »
Meus biógrafos poderem ler meus tweets in(can)de(s)centes.
Ó já sou velho, minhas cãs que caem.
Um diário é um “tableau impressionniste”. Menos para os psicanalistas (Hug…cof…-cof…Hellmuth…), cujos diários de garotinhas são impressionantes romances pré-fabricados… E depois o escândalo.